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31ièmes Journées du Patrimoine - 21/09/2014 - Montagney-Servigney

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Ce week-end viennent de se dérouler les 31ièmes Journées du Patrimoine. Comme pour la fête de la musique, cet évènement a vu le jour en France dans les années 1980, puis il a connu un succès grandissant au fil des années et s'est répandu aujourd'hui dans de nombreux pays.

La recette du succès : permettre au public de découvrir des musées, des monuments, mais aussi de nombreux lieux exceptionnellement ouverts au public, restants fermés tout le reste de l'année. Les visites sont la plupart du temps gratuites, et accompagnées d'animations et de démonstrations en public, ce qui en renforce l'attrait.

Un autre atout des Journées du Patrimoine est la proximité. Point besoin de voyager loin pour satisfaire sa curiosité ; chaque ville et presque chaque village propose quelque chose à découvrir.

Comme chaque année depuis maintenant six ans, cette manifestation est l'occasion pour moi de faire une démonstration de forge sur le site de l'ancien haut-fourneau de Montagney-Servigney, dans le Doubs.

Il y a presque quinze ans, plusieurs passionnés d'histoire se sont regroupés au sein de l'AAFoM – l'association des amis des forges de Montagney – pour rénover le site mais aussi pour faire vivre le patrimoine sous toutes ses formes, avec des collections d'objets et des reconstitutions de métiers anciens : bas fourneaux, charbonière, four à pain, forge…

Il faut savoir en effet que la Franche-Comté a connu une forte activité sidérurgique jusqu'au XIXème siècle, avant que celle-ci ne décline au profit de la Lorraine.

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Situé sur la rive droite de l'Ognon, entre Rougemont et Montbozon, le haut-fourneau de Montagney a débuté son activité dans le dernier quart du XVIIème siècle.

En 1748 la forge fabrique des boulets de canon, en 1772 l'usine produit annuellement 225 tonnes de fonte et 300 tonnes de fer.

Peu avant 1810, la famille de Grammont devient propriétaire du site et remet l'ensemble à neuf.

En 1834 la production s'élève à 800 tonnes de fonte d'où sont tirées 150 tonnes de fer en barres et 400 tonnes de fil de fer.

En 1840 la forge emploiera jusqu'à 84 ouvriers avant son déclin et sa conversion en moulin et huilerie vers 1850.

Le minerai « en grains » provient de villages environnants, mais le haut-fourneau utilisait aussi du minerai « en roche » issu des mines de Battenans et Rougemontot.

Avec une chute de 2,80 mètres, le barrage alimentant jusqu'à 7 roues à aubes était le plus haut sur l'Ognon au XIXème siècle.

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Le haut-fourneau est remarquablement bien conservé. Son architecture, en particulier les arcs-boutants destinés à soutenir le massif, la géométrie des embrasures, la répartition des zones de travail, présente une très grande similitude avec différentes gravures de l'Encyclopédie de Diderot et d'Alembert.

Le haut-fourneau et la maison des ouvriers sont classés monuments historiques en 2004. Plusieurs travaux de restauration ont été réalisés : reconstruction du gueulard, réfection des parements, des embrasures de la tuyère et de l'orifice de coulée.

L'année 2013 restera dans les mémoires car d'importants travaux de restauration se sont achevés, grâce à une souscription et au soutien des collectivités locales et de la DRAC.

Le bâtiment de l'ancien haut-fourneau a été consolidé et sa toiture a été entièrement refaite. Le site est maintenant stabilisé, les visites et futurs aménagements seront grandement facilités.

Pour la première fois, le bâtiment nous a permis de réaliser des démonstrations de forge à l'intérieur, ce qui a deux avantages.

Le premier est d'être à l'abri de la pluie et surtout du vent, qui est dangereux quand on forge.

Le second est surtout de pouvoir être dans la pénombre, ce qui permet d'estimer beaucoup plus facilement la température du métal chauffé en observant sa couleur.

Pour cette sixième année de forge, j'ai complété mon matériel avec deux enclumes supplémentaires.

La première correspond à quelque chose que j'ai longtemps cherché dans les brocantes : une bigorne longue et fine, avec une pointe conique et une pointe pyramidale très pointues, indispensable pour réaliser des petites pièces et des façonnages précis.

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La seconde enclume est une découverte : une enclume à suages. Au hasard de mes recherches, je suis tombé sur cet outil ancien original et assez méconnu. Cette petite enclume est munie d'une série d'encoches cylindriques de différents diamètres.

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Très pratique, elle permet de réaliser des sections rondes ou en demi-lune très régulières. Pour en tirer profit, je dois encore me procurer toute la série d'étampes correspondantes.

Ces deux enclumes étaient un peu abîmées et elles m'ont demandées plusieurs jours de travail pour les remettre en état. J'ai aussi dû fabriquer deux supports, leurs propriétaires n'ayant plus les billots qui allaient avec.

Sur place, j'ai pu expérimenter trois nouvelles techniques de forge.

La première est la fabrication d'un anneau sans soudure ni raccord. Il faut partir d'un morceau de fer de section carrée ou rectangulaire, qu'on fend avec une tranche.

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Une fois la fente réalisée, il faut l'agrandir et l'arrondir, jusqu'à obtenir un trou rond. Enfin, il faut travailler l'extérieur de la pièce pour en faire un anneau.

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C'est contre intuitif mais même si on travaille seul, pour le fendage, il ne faut pas utiliser le tranchet d'enclume mais une tranche montée sur un manche (ou un burin), et travailler à deux mains sans tenir la pièce, qui est posée sur l'enclume.

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La seconde technique que j'ai expérimentée est l'utilisation de la griffe.

Cet outil est très utilisé en ferronnerie d'art pour façonner des volutes.

Je me suis rapidement fabriqué une griffe avec un simple morceau d'acier de section ronde, replié en U.

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La griffe est serrée dans un étau :

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La griffe permet de réaliser facilement et rapidement une volute :

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La griffe permet de contrôler beaucoup plus facilement la courbure qu'on donne lorsqu'on cintre un morceau d'acier. Je m'en suis même servit pour réaliser la finition de mon anneau.

Enfin, bénéficiant d'une faible luminosité, j'ai pu contrôler beaucoup plus facilement la température de mes pièces, et j'en ai profité pour tester différents traitements thermiques : trempe, revenu, recuit.

Comme chaque année le public s'est montré curieux, et plusieurs anciens ont retrouvé avec émotion les souvenirs de leur jeunesse.

Les visiteurs ont pu bénéficier de nombreuses démonstrations de métiers anciens et de plusieurs expositions.

La journée s'achève par un repas sympathique entre tous les bénévoles de l'AAFoM. Nous nous sommes déjà donné rendez-vous pour l'an prochain.

Ci-dessous quelques photos de cette journée de forge.


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